Danny Reweghs

Un consensus bien trop timide

Danny Reweghs Journaliste

L’accord que viennent de conclure les Etats-Unis et la Chine a tout d’un compromis symbolique, au moyen duquel les parties cherchent à montrer leur bonne volonté et à parer au plus pressé – enrayer le ralentissement économique mondial.

L’année 2019 se sera finalement “bien terminée”: mi-décembre, les Etats-Unis et la Chine ont annoncé avoir conclu un premier accord (qui sera signé en janvier) dans le cadre de la guerre commerciale qui les oppose. Sans en connaître tous les détails, l’on peut d’ores et déjà se pencher sur les grandes lignes de cette entente. Comme nous le pressentions, elle relève plutôt d’un compromis symbolique, au moyen duquel les parties cherchent à montrer leur bonne volonté et à endiguer l’essoufflement de l’économie mondiale.

Le vent de panique constaté fin 2018 était disproportionné, mais l’enthousiasme manifesté un an plus tard l’est tout autant.

Au cours des 11 premiers mois de 2019, la Chine a enregistré 10 reculs de ses exportations vers les Etats-Unis. Sa motivation est donc purement économique puisque, malgré les mesures de soutien, sa croissance est tombée à son niveau le plus bas depuis des décennies. Donald Trump est quant à lui mû par des raisons d’une nature beaucoup plus politique (l’économie américaine se porte toujours très bien): il veut coûte que coûte être réélu en novembre.

Droits de douane

Les deux puissances sont donc convenues que les droits de douane américains sur les marchandises chinoises annoncés pour le 15 décembre ne seraient pas levés et que le taux de 15% appliqué sur 120 milliards de dollars de marchandises chinoises serait ramené à 7,5%. En revanche, le taux de 25% continuera à grever un montant correspondant à 250 milliards de dollars de marchandises. Les Chinois s’engagent en échange à acheter pour 200 milliards de dollars au moins de biens et services américains en deux ans, dont pour 40 à 50 milliards de dollars par an de produits agricoles, lesquels provenaient jusqu’à présent principalement d’Amérique latine (Argentine et Brésil, surtout). Les Etats-Unis évoquent par ailleurs une “percée” dans les transferts forcés de technologies – la Chine contraint actuellement les entreprises étrangères à céder leur technologie à ses compagnies en échange de l’accès à son marché, de l’octroi de licences administratives ou de son soutien.

Le texte ne dit rien des éléments défavorables aux Etats-Unis, comme le subventionnement des entreprises (d’Etat) chinoises ou la rivalité technologique entre les deux pays: ces points délicats sont réservés aux négociations destinées à aboutir à un accord général. Soit un tout autre chapitre. Or vu les difficultés éprouvées pour parvenir à ce premier consensus, rien ne dit que le conflit pourra être réglé cette année encore.

Stabilisation temporaire

Sur le plan stratégique et dans une perspective de long terme, l’entente doit être vue comme une stabilisation temporaire d’un processus de détérioration durable des relations, comme la signature d’une “paix armée”, que les marchés ont néanmoins chaleureusement applaudie. Le vent de panique constaté fin 2018 était disproportionné, mais l’enthousiasme manifesté un an plus tard l’est tout autant. Comme en Bourse, nous pronostiquons une (saine) correction à plus ou moins brève échéance.

Partner Content