Danny Reweghs

Moins bien, c’est mieux

Danny Reweghs Journaliste

La croissance économique est au rendez-vous et le taux de chômage est faible. Mais l’inflation n’avait plus été aussi élevée depuis de nombreuses années; le moment est donc venu de commencer à réduire la politique d’assouplissement quantitatif et, pour les Etats, de songer à s’attaquer à leur déficit budgétaire.

Cela fait près d’un an que les marchés boursiers occidentaux prospèrent. Tant l’Euro Stoxx 50 (indice des 50 principales entreprises de la zone euro) que le S&P 500 (500 plus grandes entreprises américaines) ont pulvérisé nombre de records annuels, voire des sommets historiques, pour l’indice américain. Quiconque aurait osé suggérer ce scénario au deuxième trimestre de l’an passé aurait été taxé de naïf. Et pourtant…

Certes, la politique monétaire des banques centrales et la politique budgétaire des pouvoirs publics ne sont pas pour rien dans ces résultats. Plus encore que lors de la crise bancaire, tout le monde est monté sur le pont dès le début de la pandémie. Tout le monde, c’est-à-dire non seulement la Réserve fédérale (photo) et les autorités américaines, mais aussi la Banque centrale et les gouvernements européens: l’arme de l’assouplissement monétaire (les rachats massifs d’obligations, ou assouplissement quantitatif) a été abondamment utilisée dans tout l’Occident, peu importe le déficit budgétaire qu’elle creusait.

Nouveau record

Aujourd’hui, les résultats sont là: la croissance économique est au rendez-vous et le taux de chômage est faible. Mais l’inflation n’avait plus été aussi élevée depuis de nombreuses années. Le moment est donc venu de commencer à réduire la politique d’assouplissement quantitatif et, pour les Etats, de songer à s’attaquer à leur déficit budgétaire. L’idée rend les investisseurs nerveux. La dynamique s’inversant dès lors, les économistes, les stratégistes et les investisseurs vont préférer que les nouvelles économiques ne soient plus si bonnes: les marchés boursiers ne s’en porteront que mieux. Voyez le record que vient à nouveau de battre le Nasdaq (Bourse des actions technologiques) après l’annonce du très mauvais rapport sur l’emploi américain pour le mois d’août. Des nouvelles économiques décevantes signifient en effet que la suppression du programme de relance prendra plus de temps. La progression du variant Delta aux Etats-Unis n’est donc pas une si mauvaise nouvelle pour Wall Street.

Les investisseurs préféreraient que l’emploi et l’inflation soient inférieurs aux attentes.

Corrélation quasi parfaite

Ce chiffre, publié par l’entreprise de consultance Yardeni Research (Monthly Balance Sheets, 6 août 2021), est révélateur: le lien entre l’ampleur de la hausse de l’indice S&P 500 et l’évolution des bilans cumulés des banques centrales américaine, européenne et japonaise est presque parfait depuis 2008. La corrélation est en effet de 0,96. L’année 2008 aura, décidément, marqué l’entrée dans une nouvelle ère de politique monétaire.

Jusqu’à l’été, les résultats économiques pouvaient s’emballer. A présent que les banques centrales envisagent de freiner le programme de relance, les investisseurs se contenteraient de bons chiffres. Ils préféreraient que l’emploi et l’inflation soient inférieurs, plutôt que supérieurs, aux attentes – moins bien serait, de leur point de vue, mieux, du moins pour l’instant.

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