La 5G, pas encore un investissement de rêve

Les dépenses d’installation de la 5G sont colossales. Aux investissements dans le réseau s’ajoute le prix exorbitant des licences. Pour ventiler les frais, les opérateurs choisissent de moderniser leurs réseaux sans fil.

La technologie 5G, ou télécommunication mobile de 5e génération, est le successeur de la 4G, disponible depuis 2009. La vitesse de transmission des données est beaucoup plus élevée, le délai de réponse, nettement plus court et les connexions sont plus fiables. Les appareils utilisant la 5G consomment moins d’énergie lors de l’échange de données. Les connexions pouvant s’adapter aux besoins de l’utilisateur, elles sont plus efficaces, ce qui permet aux opérateurs de réseau d’adapter vitesse et capacité aux besoins du client.

Investissements colossaux

La 5G ouvre la porte à de nouvelles applications – principalement des applications en temps réel, pour lesquelles la stabilité de la connexion et la vitesse sont cruciales (automatisation, robotisation, voitures automotrices, jeux, etc.). D’autres applications relèvent de l’Internet des objets, dans le cadre de quoi divers équipements industriels ou d’électronique grand public sont connectés entre eux.

Dans l’immédiat pourtant, la 5G n’a rien d’un investissement de rêve. Resserrement de la réglementation et concurrence accrue grèvent les revenus des fournisseurs de services télécom. Les dépenses sont colossales. Aux investissements dans le réseau s’ajoute le prix exorbitant des licences. Pour ventiler les frais, les opérateurs choisissent de moderniser leurs réseaux sans fil (3G/4G), qu’ils remplaceront par la 5G à mesure que la multiplication des applications et des appareils engendrera des problèmes de capacité.

Qualcomm: semi-conducteurs et brevets

Avec sa ligne Snapdragon, Qualcomm (ticker: QCOM) domine le marché des semi-conducteurs pour appareils mobiles. Son portefeuille de brevets portant sur divers protocoles sans fil, dont la 5G, lui garantit en outre des revenus élevés et stables. Il a été accusé ces dernières années d’abuser de sa position pour réclamer des royalties excessives; plusieurs fabricants de smartphones, dont Apple, ont même suspendu leurs paiements. Mais Qualcomm s’est plutôt bien sorti du procès intenté par la Federal Trade Commission, notamment. Il a également conclu avec Apple un accord valable jusqu’en 2025 et reconductible jusqu’en 2027. Il fournira donc bien des puces 5G à Apple, qui recommencera par ailleurs à s’acquitter des royalties. Apple s’étant récemment offert la division d’Intel qui conçoit des semi-conducteurs mobiles, tout porte à croire qu’elle finira par produire elle-même tout ou partie des puces 5G dont elle a besoin, ce qui ne la dispensera toujours pas de payer des royalties. Reste aussi à voir si ses puces seront meilleures que celles de Qualcomm: cela n’a jamais été le cas de celles d’Intel.

En plus de priver Qualcomm d’une source de revenus, l’interdiction américaine d’exporter la technologie 5G en Chine est un cadeau pour la concurrence étrangère, comme MediaTek ou Samsung. La société californienne a achevé le 4e trimestre sur un chiffre d’affaires (CA) de 6,5 milliards de dollars, soit un demi-milliard de plus que prévu. Les pronostics pour le trimestre en cours sont également supérieurs aux attentes. Le CA devrait bondir de plus d’un quart, à 30 milliards de dollars, en 2021, et les bénéfices pourraient être supérieurs de 70% à ceux de 2020. Qualcomm est le plus proche de ce qui peut être qualifié de pure player sur la 5G. L’action n’est pas bon marché, mais la croissance du groupe est impressionnante. A acheter sur repli.

Ericsson: équipements réseau

Le suédois Ericsson (ERIC) propose du matériel, des logiciels et des services connexes pour la communication sans fil aux opérateurs télécom et aux entreprises qui développent et modifient leurs réseaux. Son action, qui avait atteint des sommets à l’époque des dotcom, a mis près de 20 ans pour revenir dans la course après l’éclatement de la bulle. Le groupe s’articule autour de plusieurs divisions, dont le pôle Réseaux (développement et construction de réseaux pour les entreprises et les opérateurs télécom du monde entier), auquel il doit plus de 70% de son CA. Ericsson possède également un portefeuille bien garni de brevets pour les réseaux 3G/4G et 5G. Il a conclu des accords de licence avec plusieurs fabricants de smartphones, qui lui versent des royalties par exemplaire vendu. Il est très bien implanté sur le marché chinois, dont il dessert les trois plus grands opérateurs. C’est le pôle Réseaux qui a affiché la plus forte croissance (+13%) au 3e trimestre et qui réalise la marge bénéficiaire la plus élevée du groupe. Digital Services, spécialisé dans les services cloud et la consultance, s’arroge 15% du CA total, mais il est déficitaire en termes opérationnels. Ce n’est pas le cas des Managed Services (près de 10%), qui se concentrent sur la gestion et l’optimisation des réseaux. Emerging Business (Internet des objets et nouvelles entreprises) est pour l’instant petit et déficitaire. Ericsson a clos le 3e trimestre sur un CA de 57,5 milliards de couronnes (SEK), en hausse de 7% en un an (162,8 milliards SEK après neuf mois en 2020; 160,8 milliards 12 mois auparavant). La crise sanitaire et le report des investissements n’entravent donc pas sa progression. La direction annonce pour 2020 un CA de 230-240 milliards SEK (environ 22 milliards d’euros). En raison du recul des investissements, la marge brute est passée de 37,8% à 43,2% en glissement annuel. Ericsson disposait à la fin du 3e trimestre d’une trésorerie nette de 41,5 milliards SEK. Le flux de trésorerie disponible a atteint 17,7 milliards SEK au cours des quatre derniers trimestres. A acheter.

Nokia: marge de progression

Le nom Nokia (NOK) évoque surtout les téléphones portables, une activité en réalité désormais assurée par HMD Global. En acquérant Alcatel-Lucent en 2015, le finlandais s’est ouvert au domaine des équipements réseau. Le boycott occidental de Huawei lui permet de multiplier les contrats en Europe et aux Etats-Unis, mais il reste à la traîne par rapport à Ericsson – il n’a par exemple pas réussi à prendre pied en Chine. Le CA du 3e trimestre de 2020 s’établit à 5,29 milliards d’euros (-7% en un an; pronostic: 5,42 milliards), le bénéfice, à 203 millions, soit 0,05 euro par action (0,07 euro escompté). Entre janvier et septembre, le CA a atteint 15,3 milliards d’euros (-7%). A 37,4%, la marge brute est inférieure à celle d’Ericsson. La nouvelle équipe de direction va chercher à accroître la part de marché du groupe, au détriment sans doute, dans un premier temps, de la rentabilité. La marge opérationnelle a été revue à la baisse (9%) pour 2020, et devrait atteindre 7% à 10% cette année (chiffres inférieurs au consensus). La trésorerie s’élevait au sortir du 3e trimestre à 1,9 milliard d’euros net. La marge de progression est, dans plusieurs domaines, importante. La valorisation est inférieure à celle d’Ericsson, mais le retard peut être rattrapé. A acheter.

Les autres

Bien qu’il ait perdu des plumes dans le domaine des équipements réseau ces dernières années, l’américain Cisco Systems reste incontournable. Samsung et Apple fabriquent des appareils 5G, mais ils sont loin d’être des pure players dans ce domaine. D’autres fabricants de smartphones vont bientôt faire leur entrée dans le segment inférieur de ce marché. Samsung propose également des équipements réseau, mais reste avant tout un fabricant de puces-mémoire.

LES PRINCIPAUX ACTEURS DE LA 5G, EN CHIFFRES

QCOM

ERIC

NOK

Valeur de l’entreprise (EV), en milliards USD

171,2

38,4

21

C/B attendu en 2021

21

16

15,5

Perf. cours sur 12 mois

+72%

+34%

+6%

Dividende

1,8%

0,7%

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