Danny Reweghs

Des figues avant Pâques

Danny Reweghs Journaliste

Il est très probable que la hausse boursière ne se poursuive pas jusqu’à la fin de l’année. Il s’agira donc d’acter le plus rapidement possible les plus-values. Car la tâche pourrait se révéler plus ardue au fil des mois, et en particulier au second semestre.

Savez-vous ce que signifie ” Arriver comme des figues après Pâques “? Similaire à ” Arriver comme les carabiniers “, cette expression aujourd’hui désuète désignait une chose arrivée trop tard, devenue hors de propos. Autrefois, les figues ne pouvaient être livrées fraîches dans le Nord de l’Europe: nos contrées devaient les importer, séchées, depuis la Turquie. Les fruits secs pouvaient être consommés pendant le carême. Lorsque après Pâques, les chrétiens reprenaient une alimentation normale, les figues étaient moins prisées; dès lors, si les livraisons en provenance du royaume de Turquie accusaient du retard, elles perdaient toute leur valeur.

En 2018, alors qu’il est possible, voire très probable, que la hausse boursière ne se poursuive pas jusqu’à la fin de l’année, il va falloir tenter d’obtenir ces figues avant Pâques…: il conviendra en d’autres termes d’acter le plus rapidement possible les plus-values. Car la tâche pourrait se révéler plus ardue au fil des mois, et en particulier au second semestre. C’est la raison pour laquelle nous devons nous estimer satisfaits du bilan du premier trimestre – même si nous continuons d’envisager le reste du printemps, voire la durée de l’été, avec optimisme.

Neuf années de hausse boursière

Dans une perspective historique, un repli marqué n’aurait rien de surprenant. Rien, le 9 mars 2009, ne laissait supposer que Wall Street venait d’entamer une très longue période d’accélération. Après 108 mois (neuf ans!), la tendance, sur le marché américain, est toujours intacte. On parle de tendance haussière (bull market) lorsque l’augmentation à partir du plancher a dépassé 20%, et qu’elle se poursuit sans reculer de plus de 20%. On a frôlé une contraction de ce type au début de 2016, lorsqu’au plus fort de la crise chinoise, le marché a corrigé de 18%. La durée moyenne historique d’un marché haussier est de 54 mois (quatre ans et demi): le compteur affiche aujourd’hui le double! La situation est du reste renforcée par la progression, elle aussi exceptionnellement longue, des marchés obligataires, que soutient une politique monétaire sans précédent.

Faut-il craindre un nouveau krach? De plus en plus d’observateurs estiment que c’est le cas, mais nous ne partageons pas leur inquiétude. A +305%, la hausse de l’indice Standard & Poor’s 500 est certes bien supérieure à la moyenne historique de 136%; mais l’indice devrait engranger 1.300 points, ou 50%, encore, pour atteindre le niveau des années 1920 (+495%). L’ascension actuelle est comparable à celle de la décennie 1990. Dût-elle s’interrompre demain, la hausse de Wall Street aura été exceptionnelle. Hélas pour nous, Européens, son ampleur et sa durée au sein de la zone sont totalement différentes.

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