Total: quand le pétrole se négocie à 30 dollars le baril

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Les résultats de l’exercice 2019 sont ceux d’un monde où le pétrole se négociait à 60 dollars au moins. Pour 2020, plus rien n’est sûr.

Pour Total aussi, le monde est bouleversé. Pour deux raisons: tout d’abord, la crise sanitaire ampute de plus de 20% la demande de pétrole; ensuite, l’Arabie Saoudite et la Russie, les deux plus grands producteurs, se livrent une véritable guerre des prix. L’effet conjugué de l’effondrement de la demande et de l’offre devenue excédentaire a fait plonger le cours de l’or noir. Alors que le brut de la mer du Nord coûtait plus de 60 dollars le baril l’an passé, son prix tourne désormais autour de 30 dollars. Ce qui oblige le groupe français, dont tous les projets, depuis les investissements jusqu’à la politique en matière de dividendes, étaient basés sur un cours arrêté à 60 dollars, à réviser son modèle économique. Ses plans sont donc remisés au placard, même si ses coûts de production relativement bas et la solidité de son bilan lui permettent pour l’heure de faire face aux événements.

Les résultats de l’exercice 2019 sont ceux d’un monde où le pétrole se négociait à 60 dollars au moins. Le prix de l’or noir avait certes baissé de 8% et celui du gaz, de 38%, même, par rapport à 2018, mais le bénéfice net ajusté de l’entreprise n’a pas reculé de plus de 13%, pour atteindre 11,8 milliards de dollars. C’est l’augmentation de 9% de la production de combustibles fossiles qui a permis de limiter les dégâts. Les marges de la division Pétrochimie sont plus faibles, mais c’est normal, quand les stocks de produits raffinés sont abondants et que le cours du pétrole est élevé. L’exercice 2019 fut donc honorable. Les cash-flows ont suffi à rémunérer les actionnaires. Sur les 24,6 milliards de dollars de cash-flows opérationnels produits, seuls 17 milliards ont été consacrés aux investissements: Total a versé pour 6,6 milliards de dollars de dividendes (2,68 euros par action) et racheté pour 1,75 milliard de dollars d’actions propres. Pour l’actionnaire, le rendement s’établit à 10%. La direction a par ailleurs promis d’augmenter le dividende de 5% l’an.

Pour 2020, plus rien n’est sûr. La chute des cours du pétrole a provoqué un effondrement de l’action, dont la valeur a été divisée par deux, pour se redresser partiellement ces derniers jours. Le 23 mars, la direction a fait une estimation de la nouvelle réalité: si le cours du pétrole s’établit à 35 dollars le baril, les cash-flows opérationnels reculeront de 9 milliards de dollars cette année, à 18 milliards de dollars environ. Le groupe ramène ses investissements à 14 milliards de dollars, ce qui laisse un cash-flow disponible de 4 milliards. Une somme qui ne suffira pas à continuer à financer le dividende. Ceci dit, le bilan est très bon et la dette nette ne représente pas plus de 20% des fonds propres. Total pourrait donc emprunter; pour 2020, cela signifierait de faire passer son taux d’endettement à 23%, ce qui resterait raisonnable. La direction met fin pour cette année au programme de rachats d’actions, auquel 0,5 milliard de dollars avait déjà été consacré; le solde, de 1,5 milliard, sera conservé. Mais ce scénario reste écrit au conditionnel. En tout état de cause, un redressement du cours du pétrole à 60 dollars le baril n’est pas pour demain.

Conclusion

Son rendement a beau être attrayant, le dividende, si le pétrole doit se négocier à 35 dollars le baril, ne sera pas tenable, sauf à emprunter. Total pourrait faire face à une dette à court terme mais sur la durée, le mieux serait évidemment que l’or noir se redresse. Compte tenu des incertitudes qui règnent sur le marché du pétrole, nous recommandons de conserver le titre.

Conseil: conserver

Risque: moyen

Rating: 2B

Cours: 33,1 euros

Ticker: FP

Code ISIN: FR0000120271

Marché: Euronext Paris

Capit. boursière: 88 milliards EUR

C/B 2019: 11

C/B attendu 2020: 17

Perf. cours sur 12 mois: -33%

Perf. cours depuis le 01/01: -31%

Rendement du dividende: 7,8%

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