Royal Dutch Shell: une mauvaise communication qui coûte cher

Compte tenu du contexte, Shell ne se porte pas si mal. Mais la baisse des cours du pétrole et du gaz naturel engendre une diminution des flux de trésorerie et donc, de la capacité de remboursement de la dette, à laquelle la direction accorde désormais la priorité absolue.

Shell s’était fixé l’an passé des objectifs de réduction de la dette, de rémunération des actionnaires et d’investissements dans la croissance ambitieux. Ce qui, sur fond de hausse des cours du pétrole, d’augmentation des marges de raffinage et, depuis l’acquisition de BG, de position dominante dans le gaz naturel liquéfié, n’avait rien d’exceptionnel.

Mais la baisse, due au contexte géopolitique et économique, des cours du pétrole et, surtout, du gaz naturel, que les activités downstream (raffinage) échouent à compenser, en aura voulu autrement. Le titre est tombé à son plus bas niveau en plus de deux ans, en raison, principalement, du non-paiement des rémunérations promises aux actionnaires. C’était dans l’air dès la fin du 3e trimestre, mais l’on sait maintenant que le rachat d’actions annoncé (25 milliards de dollars) s’étalera sur une période plus longue, d’une durée non précisée. Alors que jusqu’à présent, le calendrier était respecté, le budget est, pour le trimestre en cours, réduit à 1 milliard de dollars (2,75 milliards de dollars par trimestre précédemment); à ce rythme, le retard devrait être de deux ans environ. La direction accorde désormais la priorité absolue à la dette: la dette nette est passée à 79,1 milliards de dollars, soit 1,2 fois le bénéfice opérationnel, fin 2019. Le ratio d’endettement s’établit à 29,3%, pour un objectif fixé à 25%. Or le repli des cours du pétrole et du gaz engendre une diminution des flux de trésorerie et donc, des possibilités de remboursement. La vente d’actifs ne rapporte pas suffisamment et Shell ne veut pas toucher au dividende. Il ne peut pas non plus réduire davantage ses investissements (il a investi 23,9 milliards de dollars en 2019 et le chiffre se situera, cette année, dans le bas de la fourchette prévisionnelle de 24 à 29 milliards). La seule piste envisageable est donc celle du ralentissement du programme de rachats. Elle est loin d’être bien accueillie puisqu’à l’heure où les combustibles fossiles sont montrés du doigt, ce sont ces rémunérations élevées précisément qui constituent désormais l’un des rares arguments en faveur d’un investissement dans le groupe. Dont la direction a en outre attendu trop longtemps pour communiquer.

Sur le plan opérationnel, compte tenu du contexte, Shell ne se porte pourtant pas si mal. Son cash-flow opérationnel s’établissait en 2019 à 42,2 milliards de dollars – moins que les 53,1 milliards de 2018, année record, mais presque autant qu’en 2014, quand le baril de Brent coûtait encore 100 dollars. Le prix moyen du Brent était en 2019 de 64 dollars, ce qui traduit une nette amélioration de l’efficacité. Reste qu’avec un bénéfice net ajusté qui a cédé près de 50% en un an, à 2,93 milliards de dollars, les chiffres du 4e trimestre déçoivent. C’est à l’activité gazière que le groupe doit la plus grande contribution à son bénéfice (1,99 milliard; -16%). Le cours du gaz naturel est tombé à 4,42 dollars en moyenne, contre 5,75 dollars un an plus tôt. Les activités en amont (upstream) sont les plus touchées (chute de 59% du bénéfice); le downstream, lui, a cédé 36%, en raison de l’érosion des marges de raffinage. Le bénéfice s’établit à 2,04 dollars par action, contre 2,58 dollars en 2018.

Conclusion

Le principal problème n’est pas l’étalement du rachat d’actions, mais la communication lacunaire à son sujet. Tout justifié qu’il est, le report tombe très mal. A 1,1 fois la valeur comptable, Shell est bon marché et son dividende est généreux. L’investissement reste donc intéressant.

Conseil: acheter

Risque: moyen

Rating: 1B

Cours: 23,64 euros

Ticker: RDSA NA

Marché: Euronext Amsterdam

Code ISIN: GB00B03MLX29

Capit. boursière: 185 milliards EUR

C/B 2019: 13

C/B attendu 2020: 12

Perf. cours sur 12 mois: -8%

Perf. cours depuis le 01/01: -10%

Rendement du dividende: 7,2%

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