Cameco est loin d’être onéreux

Il n’aura pas fallu sept semaines à l’action du producteur canadien pour doubler de valeur après être tombée, le 19 mars, à un niveau plancher. Contre toute logique apparente, plus la production d’uranium chute, plus le cours de Cameco remonte.

L’industrie de l’uranium a croulé des années durant sous une offre excédentaire, mais une combinaison de facteurs l’empêchait de procéder à une limitation coordonnée de sa production; en frappant la quasi-intégralité des grands producteurs (Kazakhstan, Etats-Unis, Canada, Namibie, Australie), la crise sanitaire a décidé pour lui.

Cameco a annoncé le 23 mars la fermeture de Cigar Lake, sa dernière mine en activité; l’arrêt de quatre semaines initialement prévu s’est dans l’intervalle mué en une pause à durée indéterminée. Les usines de Blind River et de Port Hope, qui convertissent en gaz (UF6) du combustible nucléaire sous forme de poudre (U3O8), sont touchées elles aussi. La fermeture coûte de 7 à 9 millions de dollars par mois. Cameco a par précaution abandonné tous ses pronostics de production et de vente pour l’exercice. Les ventes ne semblaient pourtant pas menacées. Cigar Lake avait écoulé au premier trimestre 2,1 millions de livres. Les volumes de vente ayant atteint 6 millions de livres, le chiffre d’affaires (CA) a bondi de 16%, à 346 millions de dollars, en glissement annuel. Le bénéfice net ajusté s’établit à 29 millions de dollars, soit 0,07 dollar par action.

Ces chiffres n’ont toutefois que peu d’importance, à présent que Cameco ne produit plus et puise dans ses réserves ou achète sur le marché au comptant (spot) l’uranium dont il a besoin pour livrer le combustible nucléaire promis à ses clients: c’est à la situation sur le marché mondial de l’uranium qu’il convient de s’intéresser désormais. La bonne nouvelle est que le prix de l’uranium montre enfin des signes de vie (hausse de 24 à 34 dollars la livre, depuis la fin mars). L’activité sur le marché spot s’accélère et peut-être en ira-t-il bientôt de même sur le marché à terme, où les exploitants de centrales nucléaires s’approvisionnent. Cela fait plusieurs années que la production minière est inférieure à la consommation (180 millions de livres/an), mais l’offre secondaire (recyclage) se tasse à présent également. Les stocks sont donc mis à contribution – du moins en était-il ainsi jusqu’à ce que la crise sanitaire en rende certains inaccessibles, ce qui fait grimper les prix. Il n’est dès lors pas impossible que la décision de ne plus toucher aux réserves minières soit revue à terme.

Le litige qui oppose depuis des années l’administration fiscale canadienne à Cameco à propos de ses revenus étrangers est passé en cour d’appel le 4 mars; la décision devrait tomber cette année encore. Si le jugement prononcé fin 2018 devait être confirmé, Cameco pourrait prétendre à des dédommagements, et au remboursement de l’impôt acquitté.

Le groupe a achevé le premier trimestre sur une trésorerie de 1,2 milliard de dollars, à quoi s’ajoute une ligne de crédit inutilisée d’un milliard de dollars. Les échéances de sa dette d’un milliard sont fixées à 2022, 2024 et 2042.

Conclusion

La mise à l’arrêt généralisée de la production a accéléré une série de phénomènes. Le marché spot n’est plus inondé d’uranium à bas prix. Le choix fait de préserver les réserves dans l’attente d’une remontée des cours exige, dans un premier temps, des sacrifices financiers. Le secteur commence à peine à se redresser et à 1,2 fois la valeur comptable, le titre est loin d’être onéreux.

Conseil: acheter

Risque: moyen

Rating: 1B

Cours: 10,67 dollars

Ticker: CCJ US

Code ISIN: CA13321L1085

Marché: NYSE

Capit. boursière: 4,2 milliards USD

C/B 2019: 57

C/B attendu 2020: –

Perf. cours sur 12 mois: +4%

Perf. cours depuis le 01/01: +18%

Rendement du dividende: 0,6%

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