Nervosité sur tous les marchés

Que fait-on quand la politique que l’on mène ne porte pas les fruits attendus ? On la change, répondront la plupart des gens sensés. Pas en matières économique et financière. L’échec n’est pas dû à la politique. Il provient d’ailleurs.

C’est ce qu’on apprend de la Réserve fédérale (Fed) qui doit expliquer pourquoi son expansion monétaire n’a pas d’influence sur l’économie. La cause se trouve auprès de ces pays qui ne se sont pas assez ouverts aux produits américains, estime-t-elle. Elle vise directement l’Allemagne, la Chine et le Japon.

La Fed leur reproche de ne pas réduire assez rapidement leur excédent commercial. Elle prétend même que ces pays dévalorisent artificiellement leur monnaie. L’attaque de la Fed est difficilement acceptable. L’euro (EUR) s’est raffermi tout au long de l’année par rapport au dollar (USD). Le Japon tente de relancer sa conjoncture en menant une politique monétaire très souple, sans trop de succès, il est vrai. La Chine a lié sa monnaie, le yuan (CNY), au dollar, de sorte qu’aucun avantage ni désavantage n’est subi par les Américains. La déclaration dénote en fait l’impuissance de l’autorité monétaire.

Tous les pays essaient de conserver leurs acquis. Certains y parviennent mieux que d’autres. Mais ce qui ressort du marasme ambiant est que les marchés sont devenus peu fiables. Après le scandale du LIBOR (un taux d’intérêt interbancaire), voici que les principales banques qui agissent sur le marché des changes manipulent le cours des devises. Il se pourrait que sans leurs manipulations, les balances des paiements décriées par la Fed auraient été plus saines et équilibrées de nos jours.

Le LIBOR et tous les tarifs similaires déterminent le taux d’intérêt d’une quantité invraisemblable de produits et de contrats. Il affecte un marché estimé à quelque 500.000 milliards de dollars. Le marché des changes, lui, négocie quotidiennement quelque 5.300 milliards USD. Il est clair qu’un tel montant n’a pas grand-chose à voir avec le commerce international. Pour s’en faire une idée, le PIB des Etats-Unis avoisine les 16.000 milliards USD, soit trois fois le montant quotidien du marché des changes ! Ce marché est détenu par quelques grandes banques (Barclays Bank, Citibank, Crédit Suisse, Deutsche Bank, JPMorgan Chase, Royal Bank of Scotland et UBS). Les autres intervenants restent marginaux et agissent le plus souvent comme contreparties des grandes banques susnommées.

Les taux de changes affectent néanmoins les relations commerciales entre les pays. Si les banques ont la liberté de déterminer les taux à leur guise, ce qu’elles font par ailleurs avec tous les cours, il est compréhensible que certaines politiques monétaires n’arrivent jamais à leurs fins. Les banques peuvent la contrecarrer à l’envi. Un procureur américain, Jacob Frenkel, s’étonnait récemment sur le fait que JP Morgan Chase préférait débourser 13 milliards USD pour éviter un procès concernant ses manipulations dans le domaine hypothécaire, plutôt que subir le procès. Selon lui, la banque réduirait sensiblement l’amende, la ramenant à quelque 3 milliards à peine.

Les scandales à répétition nous inspirent pourtant la réponse. JPMorgan a sans doute pas mal de choses peu reluisantes à cacher qu’un procès pourrait mettre au jour. La banque pourrait alors devoir débourser des amendes bien supérieures au 13 milliards initiaux. Son accord pour une amende somme toute vertigineuse est donc purement opportuniste. Cela en dit de toute façon long sur la mentalité régnant dans le secteur bancaire globalisé.

Les différents scandales dans lesquels les banques occupent la place centrale nous conduisent à une évidence : il faut leur interdire toute fixation des prix sur tous les marchés où elles opèrent en tant que teneur de marché. Si on veut éviter les manipulations, il est grand temps de revenir au fixing. C’est le seul système qui permet la fixation d’un cours émanant de l’équilibre entre l’offre et la demande. De nos jours, chaque transaction conduit à une cotation, celle imposée par le teneur de marché. L’équilibre entre l’offre et la demande n’existe plus. Ce système anglo-saxon, introduit en force avec le Big Bang de 1986, favorise la spéculation, sur toutes ses formes. Le fixing éliminerait une large partie de celle-ci. Tout le monde en bénéficierait, sauf les grandes banques, bien entendu.

Nous avons d’ailleurs eu un exemple dans le courant de la semaine passée. Selon Eurostat, l’inflation dans l’Union serait retombée à 0,7%. Les spéculateurs misent d’ores et déjà sur une baisse des taux directeurs. La Banque centrale européenne (BCE) réduira ses taux, même jusqu’à les rendre négatifs, pour éviter tout risque de dépression, prétendent-ils. L’euro a donc chuté sur le marché des changes, perdant 2% face au dollar US. Il a perdu du terrain par rapport à une majorité de devises. On saura ce jeudi si la BCE réduira effectivement ses taux. Dans l’intervalle, ces agissements ont attisé la guerre des devises. Certainement pas le meilleur moyen pour sortir de cette crise.

La nervosité était palpable sur tous les marchés. Les banques perdent chaque jour davantage de leur prestige. Leurs titres fléchissent partout, sur tous les marchés et dans toutes les devises. Les titres industriels, même de pacotille, et les supranationaux en ont profité. Ils se sont tous redressés. Les profits étaient toutefois éparpillés. Les taux d’intérêt officiels se sont légèrement raidis – les taux longs progressant plus rapidement que les courts – alors que les courbes issues du marché obligataire international glissaient vers le bas. Les mouvements restaient cependant dérisoires.

Les nouvelles tranches inondent toujours le marché primaire. On notait aussi une recrudescence de titres pourvus de coupons variables. Signe que les émetteurs s’attendent à une hausse prochaine des taux d’intérêt. Les émetteurs de piètre qualité optent actuellement pour les PIK (Payment In Kind). Il s’agit d’obligations dont le coupon est réglé soit en espèces, soit en tranches obligataires supplémentaires. Ces émissions s’adressent généralement aux institutionnels.

Le petit porteur devra se contenter d’une des deux émissions proposées par KBC Ifima (A-). Comme toujours, le montant émis dépendra du succès du placement. L’émission à 5 ans en EUR rapporte 0,78% de plus que la moyenne du marché, ce qui est plutôt chiche. L’émission en couronne norvégienne (NOK) est, en revanche, correcte. Nous ne la recommandons pas parce que son montant ne lui garantira pas une négociabilité aisée. Les deux émissions en EUR d’IBM (AA-) sont chiches. Elles coteront sur la Bourse de New York. La nouvelle tranche de la BEI (AAA, supranationale) en rand sud-africain (ZAR) est meilleur marché sur le marché secondaire (alt.2). Elle convient à tous ceux qui ont une perte de change à récupérer.

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