Les obligations ont de nouveau la cote

C’est du moins ce qu’on peut déduire du flux de capitaux qui s’engouffre dans les fonds spécialisés.

.Peut-on parler de regain ? Après avoir semé la panique il y a deux mois, Ben Bernanke, le gouverneur de la Banque centrale américaine, a adapté ses intentions. Il durcira sa politique monétaire dès qu’il aura la certitude que la reprise est durable. Il a, pour ce faire, diminué le niveau des seuils qu’il tiendra à l’oeil, de sorte qu’il ne sera pas obligé d’agir rapidement. Une façon comme une autre de rassurer les marchés financiers que le robinet des liquidités restera grand ouvert pour un bon moment encore.

Dans la certitude que l’argent sera abondamment disponible, les investisseurs sont revenus vers les obligations. Ils sont toutefois devenus plus prudents et choisissent leurs titres avec précaution. Ce qui fait que les échelles des taux d’intérêt ont progressé. Il n’y a donc pas de revirement de tendance. Au contraire même ! On a l’impression que les investisseurs réaménagent leur portefeuille. Ils remplacent leurs titres par d’autres dont le rapport qualité-prix leur convient mieux. Ils ajustent aussi les durées résiduelles pour mieux faire face à une brusque remontée des taux d’intérêt.

Leurs opérations ont causé nombre de mouvements sur le marché obligataire international. On comptait de 5 à 10 fois plus de titres orientés à la baisse qu’inversement, dans quasiment toutes les devises. Cela ressemble donc peu à une ruée. Certes, les nouvelles émissions se bousculent actuellement. Elles trouvent facilement preneurs grâce à leurs conditions plus adéquates que précédemment.

Les obligations, si elles sont de qualité, conserveront de toute façon leur attrait face aux scandales à répétition et aux difficultés multiples auxquels les banques sont confrontées. Elles sont préférables aux produits bancaires. Les banques européennes, tout comme leurs collègues occidentales, doivent maigrir si elles veulent survivre. Selon les derniers chiffres de la Banque centrale européenne, elles ont déjà assaini pour quelque 2.400 milliards d’euros. D’après une étude de la Royal Bank of Scotland, elles devraient encore en faire autant, pour 2.700 milliards, prochainement, soit près de trois fois plus qu’annoncé deux mois plus tôt. Le total des bilans des banques européennes avoisine les 33.000 milliards d’euros, soit 3,5 fois le PIB de la zone euro !

Le temps presse car il devient de plus en plus difficile de prolonger les créances déficitaires, surtout quand les taux d’intérêt remontent. La BCE devra procéder à un audit général de quelque 6.000 banques au début de l’année prochaine. Pour s’y préparer, elle entame enquête sur enquête afin d’apprendre ce qu’elle pourra dévoiler, de sorte à ne pas semer de panique sur les places financières. Les régulateurs américains ne l’entendent pas de cette oreille et demandent à pouvoir examiner eux-mêmes les comptes des banques européennes.

Il est clair que dans pareil contexte l’annonce par le gouvernement belge de lancer un emprunt populaire tombait au plus mal. Surtout en fonction de la structure proposée. Il est probable que ce projet ne rencontrera qu’un succès médiocre. L’épargne est actuellement utilisée par les banques pour renforcer leur bilan. Il y a peu de chances que ces banques favorisent cet emprunt – qui n’en est pas un, d’ailleurs. Pour les épargnants, cet emprunt, dans sa mouture actuelle, offre peu d’attrait. Une ristourne de 10% sur le précompte mobilier ne pèse pas lourd face aux désavantages et risques que comporte cet emprunt.

Si cet emprunt, qu’il soit sous la forme d’un compte bancaire spécial ou d’un fonds de placement, fera partie de la garantie de 100.000 euros, il n’en demeure pas moins que l’épargnant cumulera le risque créditeur de la Belgique et de sa banque. On sait depuis le sauvetage des banques chypriotes que les banques restent douteuses quand bien même elles jouissent d’une garantie d’Etat. Contrairement à un compte d’épargne, le montant versé sur le compte spécial sera bloqué 5 ans au moins. Contrairement à un emprunt d’Etat ordinaire, l’épargnant ne sera pas à même de négocier son emprunt sur le marché et restera tributaire de sa banque. Il ne pourra même pas transférer son compte spécial vers une autre banque s’il lui venait l’idée de changer de banque. En clair, l’Etat reproche aux épargnants de laisser dormir leurs fonds et il leur offre une alternative qui les rend plus immobiles encore. Dans l’attente d’une révision de la copie actuelle, l’emprunt populaire, tel qu’il est présenté aujourd’hui, est totalement déconseillé.

Le dollar (USD) a fortement souffert sur le marché des changes. Il a reculé non seulement à cause de résultats conjoncturels contradictoires, mais aussi à cause du laxisme réitéré de la Fed. Il a cédé 1% face à l’euro. Le succès aux élections parlementaires au Japon renforçant le gouvernement d’Abe a permis au yen (JPY) de se redresser de 0,6%. Les obligations libellées en JPY ont aussi affiché une meilleure performance que les autres. Les gains restaient néanmoins modestes. Les devises à haut rendement ont toutes fléchi, excepté le rand sud-africain (ZAR) qui a bien résisté. Les principales victimes étaient le peso mexicain (MXN ; -2,3%), le rouble russe (RUB ; -2,1%), le réal brésilien (BRL ; -2%), la lire turque (TRY ; -1%) et le dollar australien (AUD ; -0,7%).

Au niveau obligataire, les titres chutant surpassaient les autres. Notons cependant la prouesse du Portugal en EUR qui a grimpé de 4% la semaine passée. Tous les titres pourris et autres obligations industrielles ayant été chahutés les semaines précédentes ont regagné du terrain aux dépens des émetteurs de qualité. Les titres allemands, par exemple, ont fléchi de 3% en moyenne.

L’activité sur le marché primaire reste soutenue, sans qu’il y ait beaucoup d’émissions destinées aux petits porteurs. Deux émetteurs italiens font leur entrée sur le marché. Prada (sans notation), la célèbre maison de confection, offre à peine 1,56% de plus que la moyenne du marché avec son émission à 5 ans en euro. Gamenet (B+), une société offrant des jeux sur Internet, est plus généreuse. Elle offre 6,11% de plus que la moyenne du marché. Le titre ne décolle cependant pas sur le marché gris. La Royal Bank of Canada (AAA) lance une émission sécurisée jouissant de la plus haute des notations. Toutes ces émissions s’adressent aux plus fortunés d’entre nous.

Rabobank (AA-) lance 50 millions de TRY à 2 ans. Son rendement semble attrayant. On trouve toutefois mieux sur le marché secondaire, comme cette autre Rabobank (alt.1) qui rapporte plus de 1% de plus et qui reste plus avantageuse tant que frais et différence de prix n’excèdent pas 2,24%. Nous déconseillons toutefois la TRY. La BERD (AAA, supranationale) en USD s’adresse à ceux qui utilisent effectivement le dollar et convient au renouvellement de titres échus.

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