Le yuan monte en puissance

L’hégémonie du dollar (USD) touche à sa fin. Le yuan chinois (CNY) monte lentement en puissance. On ne le remarque pas encore. C’est que la banque centrale du pays avance lentement. Elle progresse pas à pas, préparant méticuleusement l’abandon du dollar.

La banque centrale chinoise repose sur une montagne de billets verts, essentiellement sous la forme de bons du Trésor américain (estimés à quelque 1.300 milliards USD). Elle ne peut se permettre de bévue, elle y perdrait trop. Elle n’achète plus de nouveaux emprunts en dollars et ne participe plus à leurs adjudications. Elle vend même régulièrement ses titres sur le marché américain. Quant aux dollars en soi, elle les investit dans l’immobilier ou rachète des entreprises.

Depuis plus d’un an, la banque centrale a facilité l’accès au yuan. Certes, le CNY n’est pas encore une monnaie convertible à part entière. La banque centrale en détermine toujours le taux de change et la devise reste liée au dollar. C’est la façon idéale pour le pays d’éviter tout risque de change. Le commerce international et, surtout, le prix des marchandises sont encore et toujours exprimés en dollars.

Quiconque souhaite aujourd’hui acheter du CNY doit obtenir la permission des autorités chinoises. Pour favoriser son expansion économique dans cette région du monde, la Chine vient d’accorder à quelques banques commerciales de Hong Kong, Shanghai, Singapour et Taïwan la permission de convertir le CNY. Ce qui permet à la Chine de poursuivre ses ventes en dollars tout en se faisant payer en yuans.

La Chine a également conclu des accords swaps (d’échange) avec plusieurs banques centrales afin de promouvoir les échanges bilatéraux. Les premiers accords ont été signés avec la Russie, le Brésil et quelques pays du Sud-Est asiatique. Plus récemment, la Banque centrale européenne et la Banque d’Angleterre ont rejoint la liste. L’accord concerne 350 milliards de CNY contre 45 milliards d’euros avec la BCE et de 200 milliards de CNY contre 20 milliards de livres avec l’Angleterre. Ces accords ont une durée de trois ans. Grâce à de tels accords, la Chine écarte de facto l’utilisation du dollar dans ses échanges commerciaux.

Début décembre, une nouvelle étape a été franchie. Plusieurs banques anglaises ont conclu des accords similaires avec des institutions chinoises. La Standard Chartered, très active dans cette région du monde, travaillera avec l’Agricultural Bank of China pour régler ses opérations en CNY et ceci depuis Londres. La filiale londonienne de la banque chinoise acceptera des dépôts libellés en CNY des clients de la banque anglaise. Le gouvernement britannique a, en outre, donné son feu vert pour l’implantation à Londres d’autres filiales de banques chinoises.

Ces agissements faciliteront l’acceptation du CNY dans les échanges commerciaux internationaux. Il existe aujourd’hui une quantité impressionnante d’obligations libellées en CNY, mais les transactions se dénouaient encore dans une autre devise, le plus souvent en USD. Pour l’investisseur qui adopte le dollar comme monnaie de référence, cela ne posait aucun problème, les deux devises évoluant de concert. Mais pour celui qui utilise une autre monnaie, le risque de change restait double et dépendait pour une large partie du dollar. Avec ces nouvelles accommodations, toute opération en CNY pourra se dénouer directement dans cette devise sans devoir passer par une autre devise convertible.

L’étape suivante consistera à rendre le CNY plus facilement convertible. Ce qui le découplera du dollar. L’affaire prendra encore du temps avant de se concrétiser. La Chine est particulièrement prudente en la matière et ne souhaite pas assumer les implications d’une monnaie de réserve. Le pays préfère l’élaboration d’un nouveau système monétaire international sans monnaie de réserve. Il n’en demeure pas moins que dès que le CNY deviendra plus facilement convertible en EUR, son rôle international grandira. Les investisseurs avisés pourront alors échanger leurs avoirs en USD contre du CNY.

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