L’heure des semailles

La croissance démographique explosive à laquelle nous assistons pose d’importants défis au secteur agricole. De nombreuses entreprises sont bien placées pour tenter de les relever. Les possibilités d’investir dans le secteur sont nombreuses également.

La progression de la richesse, l’amélioration de l’hygiène et surtout les avancées spectaculaires de la médecine provoquent une accélération de la croissance démographique mondiale. La véritable explosion démographique que nous avons connue entre 1900 et 2000 a porté la population mondiale à environ 6 milliards d’individus, soit un quadruplement en près d’un siècle! Et la plupart des projections indiquent que nous serons environ 9milliards d’êtres humains d’ici 2050. Quelque 90% de cette croissance démographique devrait se concentrer dans les pays émergents. L’augmentation de la population sera nettement plus limitée dans les pays industrialisés.

Avenir florissant

Cette croissance démographique explosive pose d’importants défis au secteur agricole. Alors qu’on estime que 800 à 900 millions de personnes, soit 12% de la population mondiale, souffrent de la faim aujourd’hui, il faudra en effet nourrir 2 milliards de bouches supplémentaires d’ici 2050. Selon les Nations unies, la production agricole devra dès lors augmenter de 60% d’ici là pour pouvoir nourrir la totalité de la population mondiale. Ce défi est encore exacerbé par la pression qui s’exerce sur les terres agricoles (déboisement, évolution des sols et changement climatique) d’une part et l’urbanisation croissante d’autre part. Ce dernier phénomène entraîne de plus une modification des habitudes alimentaires. La hausse des revenus provoque également une augmentation de la consommation de viande. Ainsi l’Européen moyen mange-t-il sept fois plus de viande que l’Indien moyen. L’Américain moyen en mange même dix fois plus. Le secteur agricole a donc toujours de très beaux jours devant lui.

El Niño

Ces dernières années ont cependant démontré que cette croissance n’entraînait pas une évolution linéaire des cours. On observe ainsi des fluctuations d’ampleur croissante dans les récoltes, causées par des variations climatiques plus importantes qui ont un impact temporaire mais très net sur les cours des matières premières agricoles. Les pics sont plus élevés et les creux plus profonds. Actuellement, nous tentons de sortir de l’un de ces creux. Les cours des matières premières agricoles et des actions du secteur sont en forte baisse depuis près de cinq ans. Et El Niño ne facilite rien. Les conséquences du phénomène météorologique se font sentir partout, de l’Amérique latine à l’Asie en passant par l’Australie. El Niño ampute les (futures) récoltes, surtout dans l’hémisphère sud. Jusqu’à présent, ses effets sur les cours ont été atténués par les réserves élevées de matières premières agricoles, surtout de céréales (maïs, blé, soja). Seule l’huile de palme a vu ses réserves internationales baisser par rapport à 2010. L’effet d’El Niño sur les cours y est plus marqué: depuis début 2016, le cours de l’huile de palme a déjà augmenté de plus de 25%.

Vague de consolidation

Avec une formation de plancher qui tarde à se dessiner – ou un redressement moins net qu’espéré – pour la plupart de matières premières agricoles, une consolidation dans le secteur est presque indispensable. Nous avons pu en profiter par le biais de l’offre du groupe chinois ChemChina sur le champion de la protection des cultures Syngenta, dont nous avons pu liquider la position dans le portefeuille modèle sur un gain d’environ 30%. Citons également les tentatives de fusion entre Dow Chemical et Du Pont et entre Bayer et Monsanto.

Plusieurs opérations d’envergure se préparent également dans le secteur des engrais. Potash Corporation (dont nous détenons la valeur en portefeuille) avait déjà tenté d’acquérir son concurrent allemand K+S l’an dernier, mais la transaction a capoté. Elle s’est alors tournée vers son concurrent canadien Agrium, dont l’acquisition devrait être bouclée d’ici la moitié de l’an prochain. Et sans doute lancer un véritable feu d’artifice.

Rendement à l’hectare

Accroître la production alimentaire de 60% implique nécessairement d’augmenter le rendement à l’hectare. La croissance des superficies agricoles et surtout de la productivité doit essentiellement venir d’Afrique au cours des décennies à venir. Le continent devrait connaître la même évolution que l’Amérique latine ces dernières dizaines d’années.

Il est possible d’augmenter le rendement des terres par l’irrigation et la fertilisation. Concernant l’irrigation, force est cependant de constater que le pourcentage de terres arables irriguées a stagné juste en dessous de 50% au cours de la décennie passée. En matière de fertilisation en revanche, la tendance est toujours orientée à la hausse. La consommation de fertilisants par tonne de céréales produites a sextuplé ces 50 dernières années et continue de s’accroître. Remarquons aussi que les investissements en recherche et développement ont augmenté beaucoup plus rapidement que la production alimentaire mondiale, surtout ces dernières années. Il en a résulté une accélération des innovations dans le secteur.

Redressement attendu des cours

Des récoltes satisfaisantes dans les principales zones de production et la forte diminution de l’intérêt pour les biocarburants ont ramené l’indice des prix agricoles en termes réels (compte tenu de l’inflation, donc) à son niveau de la moitié des années 1980. Les cours réels n’ont été inférieurs à leur niveau actuel qu’à la moitié des années 1990.

Le secteur agricole n’est pas un thème d’investissement neuf. Son dernier âge d’or remonte au début du siècle. La baisse des cours presque constante ces cinq dernières années a eu raison de l’appétit des investisseurs, malgré des fondamentaux à plus long terme presque inchangés. Le potentiel de redressement est donc suffisant. Plus il deviendra difficile d’encore accroître la production agricole, plus le pouvoir de tarification des producteurs va augmenter. Une évolution qui sera favorisée par le mouvement de consolidation en cours.

Investir dans le secteur agricole

Il existe naturellement de nombreuses possibilités individuelles d’investir dans le secteur. Pour 2017, nous privilégions le secteur des engrais (notamment Agrium, CF Industries, K+S, Mosaic, Potash Corp…) et les groupes de plantations (notamment Anglo-Eastern Plantations et Sipef).

Monsanto est bien entendu un cas à part. L’action s’échange environ 20% sous le prix offert par Bayer, ce qui indique déjà que l’approbation de la fusion est loin d’être acquise. D’autant que l’administration Trump pourrait encore compliquer l’opération. Mais l’action est certainement à suivre de près en 2017.

Il est également possible de miser de manière plus générale sur la tendance haussière attendue dans le secteur agricole au cours des années à venir, par le biais du tracker VanEck Vectors Agribusiness ETF. Ce tracker est coté sur le NYSE (ticker MOO; code ISIN: US92189F7006).

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