Investir dans les “marchés frontières” (I)

Outre ” emerging markets ” ou marchés émergents, le monde financier emploie une autre expression pour désigner les marchés en croissance : “frontier markets” soit, littéralement, “marchés frontières”. Il s’agit d’économies qui n’ont pas encore atteint le statut de marchés émergents mais sont en bonne voie de le devenir.

Les marchés frontières représentent au total 30% de la population mondiale. La plupart d’entre eux sont situés sur les continents africain, sud-américain et asiatique, ainsi qu’au Moyen-Orient. Pour les investisseurs – et surtout les investisseurs particuliers -, il est presque impossible d’y investir directement. Des trackers spécialisés offrent cependant une issue. Voyons si ces ETF constituent une opportunité d’investissement intéressante.

Il va de soi que les investissements dans les marchés frontières ne peuvent représenter qu’une petite partie de votre portefeuille. En revanche, ils peuvent certainement offrir une valeur ajoutée en tant qu’instruments de diversification, en raison de leur très faible corrélation avec les marchés développés. La semaine dernière, nous avions expliqué dans le cadre de l’analyse des trackers spécialisés dans la Bourse russe que les marchés émergents n’ont guère été performants depuis le début de l’année. Les entreprises actives sur les marchés émergents sont de plus en plus sensibles à la conjoncture. Dans le cas de la Russie, c’est la baisse des prix des matières premières qui pèse sur les cours d’actions, alors que la croissance économique plus molle que prévu et les difficultés de l’industrie manufacturière mettent un frein à la progression des actions chinoises. Les performances des marchés frontières dépendent davantage de la croissance de la demande intérieure, et seulement dans une moindre mesure du dynamisme des exportations.

Les performances des marchés frontières n’ont rien à envier à celles de nombreux marchés développés ces cinq derniers mois. Alors que le MSCI Emerging Markets Index a abandonné 4,4%, le MSCI Frontier Markets Index a gagné 13,3% sur la même période. Bien entendu, un investissement dans les marchés frontières comporte également des inconvénients et des risques. Un premier inconvénient tient au fait que les marchés financiers n’y sont pas encore très développés, ce qui peut notamment se traduire par une liquidité réduite et par conséquent un choix limité d’actions dans lesquelles les fonds ou trackers peuvent prendre une position importante. Un autre problème est le manque de stabilité politique et l’absence de cadre réglementaire. Sur certains marchés, la participation maximale qui peut être prise par des investisseurs étrangers dans une entreprise est également limitée. Enfin, il ne faut pas oublier le risque de devise. Il est indispensable de garder ces inconvénients à l’esprit si l’on veut pouvoir décider d’investir ou non dans les marchés frontières en toute connaissance de cause. Dans cet article, nous nous intéresserons à deux ETF généraux consacrés aux marchés frontières. Il existe également des trackers spécialisés dans une ou plusieurs régions frontières, mais nous les aborderons dans un prochain article.

iShares MSCI Frontier 100 ETF (FM)

L’iShares MSCI Frontier 100 ETF est émis par les spécialistes des trackers BlackRock et coté sur le NYSE (ticker : FM) depuis l’automne dernier. Le tracker réplique l’évolution du MSCI Frontier Markets 100 Index qui comprend les 100 plus grandes entreprises (en termes de capitalisation boursière) du plus large MSCI Frontier Markets Index. Les actions de l’indice satisfont à une série de critères en matière de liquidité et de valeur boursière et sont également accessibles aux investisseurs étrangers. A la fin du 1er trimestre, 27% (environ) des entreprises de l’indice étaient originaires du Koweït, suivi par le Qatar (17%), le Nigeria (14%), les Emirats arabes unis (11%), le Pakistan (5%) et le Kenya (4%). La surreprésentation du secteur financier, avec (environ) 54% des entreprises, est très forte. Il faut cependant remarquer que les groupes immobiliers sont inclus dans cette catégorie. Suivent le secteur des télécommunications (13%), l’industrie (12%) et l’énergie (9%). Les frais de gestion annuels sont fixés à 0,79%. Le tracker a gagné près de 17% depuis le début de l’année, ce qui est mieux que le S&P500.

Guggenheim Frontier Markets ETF (FRN)

Le Guggenheim Frontier Markets ETF est émis par Guggenheim Investments et coté sur le NYSE (ticker : FRN) depuis près de cinq ans. Ce tracker suit les performances du BNY Mellon New Frontier DR Index sous-jacent, qui compte actuellement 38 membres et est repondéré chaque trimestre. L’abréviation DR signifie Depository Receipt, ce qui constitue une différence de taille par rapport au tracker BlackRock. L’indice sous-jacent du FRN ne contient en effet que des actions d’entreprises de marchés frontières qui sont cotées sur les différentes Bourses américaines (NYSE, NYSE Arca, Amex, Nasdaq) ou le London Stock Exchange. De ce fait, la surpondération des entreprises sud-américaines est assez prononcée. Cela se reflète dans la répartition géographique, avec une part de 51% pour les entreprises chinoises, de 14% pour les entreprises colombiennes et de 9% pour les entreprises argentines. Suivent l’Egypte (6%), le Pérou (6%) et le Kazakhstan et le Nigeria (tous deux 5%). Comme dans le cas du FM, le secteur financier est surpondéré, mais avec une part de 29%, sa domination est moins écrasante. Les autres secteurs les mieux représentés sont l’énergie (19%), les services d’utilité publique (16%) et les biens de consommation (14%). Avec 0,7%, les frais de gestion annuels de FRN sont un peu plus bas. Ce n’est cependant qu’une maigre consolation, car avec une perte de près de 15% depuis le début de l’année, le FRN est moins performant qu’à la fois le FM, les Bourses des pays développés et même la plupart des marchés émergents.

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