Beauté aveuglante

De temps à autre, il arrive que l’on croie énormément dans une entreprise, mais que la valorisation empêche d’envisager un investissement. Vous perdez alors l’action de vue jusqu’à ce qu’une lettre d’un lecteur inquiet par la récente baisse du cours attire à nouveau votre attention. C’est ce qui nous est arrivé avec Essilor International (74,5 EUR; Bourse de Paris; ticker : EI; capitalisation boursière : 16 milliards EUR; code ISIN : FR0000121667). Leader mondial dans les lentilles (89% du CA du groupe au cours des neuf premiers mois de l’année), cette entreprise française issue d’une fusion trouve son origine en 1849, avec la création d’Essel. Silor sera fondée près d’un siècle plus tard (en 1931). Et l’an dernier, on a fêté les 40 ans de la fusion entre Essel et Silor qui a donné naissance à Essilor. Sa croissance soutenue a successivement permis à Essilor de conquérir une place dans l’indice CAC40, puis d’intégrer l’indice Eurostoxx50 en juin 2012. Le groupe a même versé un dividende en hausse pour la 20e année d’affilée en 2012. La grande passion et le moteur d’Essilor ont toujours été l’innovation. Depuis 2011, tous les efforts en la matière ont été regroupés sur trois sites : Créteil (France, siège européen du groupe), Dallas (pour les Etats-Unis) et Singapour (pour l’Asie). Essilor prend au moins 70 brevets par an depuis 2005 et 45% du CA du groupe provenaient l’an dernier de produits qui étaient sur le marché depuis moins de trois ans. Cette primauté à l’innovation a encore été récompensée par Forbes l’an dernier. Pour la 2e année d’affilée, le grand magazine d’affaires américain a inclus Essilor dans sa liste des ” 30 entreprises les plus innovantes au monde “. Un autre moteur de la croissance du groupe est son rôle de consolidateur dans un marché très fragmenté. Dans les pays émergents surtout, ce segment est éclaté entre des dizaines, voire des centaines de petites entreprises. Fin octobre, on recensait déjà 20 entreprises qui avaient été rachetées ou avec lesquelles un partenariat a été conclu depuis le début de l’année. Le tout pour un CA supplémentaire de 165 millions EUR. Treize d’entre elles sont actives dans les marchés émergents. Celui où les Français enregistrent la croissance la plus soutenue est bien entendu la Chine. Un phénomène qui devrait encore s’accentuer à mesure que les Chinois sont plus nombreux à disposer de revenus suffisants pour s’attaquer à leurs problèmes de vue, mais aussi avec le vieillissement constant de la population. En 2011, le CA d’Essilor dans l’Empire du Milieu ne dépassait pas 84 millions EUR. Pour 2020, l’objectif est le porter à 1 milliard EUR. De manière générale, l’objectif est de porter le CA réalisé dans les pays émergents de 612 millions en 2011 à 1,5 milliard EUR en 2015. L’an dernier, 18,3% des ventes du groupe provenaient des pays émergents. Sur les neuf mois de cette année, leur part a atteint déjà 25,7% et ce, malgré une évolution clairement négative des cours de change. Cette année sera d’ailleurs une année de croissance un peu “lente” après le “faux départ” du 1er trimestre (croissance du CA d’à peine 1,3%). La croissance du CA s’est “normalisée” à 7,1% au 3e trimestre (sans tenir compte des écarts de change). L’objectif est d’atteindre 6% sur l’ensemble de l’année. Le marché attend à nouveau une croissance de 10% du CA et du bénéfice pour l’an prochain.

Il est clair qu’à 22,5 fois le bénéfice attendu en 2014, près de trois fois le CA et selon un rapport valeur d’entreprise (EV)/cash-flows opérationnels (EBITDA) de 12,5, l’action Essilor est plutôt chère par rapport à la moyenne du marché. Mais c’est logique vu les perspectives nettement plus favorables. Par rapport à la moyenne de la période 2010-2013, la valorisation est d’ailleurs relativement acceptable. Nous en profitons pour relever l’avis à ” digne d’achat ” (1B) et fixer une limite d’achat pour le portefeuille modèle.

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